1984. Annonçant l’invention du RU 486, Libération titre en première page : « Une pilule pour l’interruption précoce de la grossesse. Demain l’avortement ni vu, ni connu. »
Dans son article « Troublante liberté », Éric CONAN mesure bien l’enjeu révolutionnaire de ce produit : « Coïncidence ou ruse des temps ? Au moment même où la polémique sur la « banalisation » de l’avortement excite les hémicycles, le Pr Étienne-Émile BAULIEU annonce tranquillement que sa trouvaille, le « RU 486 », est en bonne voie pour rendre assez rapidement ce débat obsolète. Non pas que l’objet de ce conflit rituel – l’avortement – disparaisse : il deviendrait simplement indiscernable, entre l’invisible et le symbole. Car c’est une vraie « banalisation », cette fois-ci, qu’entraînera cette « pilule abortive » grâce au confort énorme qu’elle va apporter. Confort dans les corps ; et dans les têtes. Le RU 486, c’est tout bonnement l’arrivée d’une commodité de plus – l’avortement précoce – sur les étagères déjà encombrées de la pharmacie familiale. Un retard de règles ? À discrétion et en toute liberté, le problème, si c’en est un, est évacué. Avec cette prouesse de la chimie, les femmes pourraient ainsi atteindre, de façon plus pratique et surtout plus sereine qu’avec l’IVG, un sommet inégalé de cette fameuse « maîtrise de leur corps » : avec un certain frisson, il leur serait possible (contrairement à la contraception) de refuser une grossesse non pas avant, mais après la conception alors que, toute proche, elle vient de s’amorcer. Maîtrise totale, libérée de l’environnement médical, mais dont la contrepartie évidente serait aussi un degré jamais atteint de la dépossession masculine. (…) Le RU 486… pourrait à terme être utilisé cycliquement comme un contraceptif. Avec cet usage préventif, la question ne se poserait plus : qu’il y ait eu conception ou non, les règles seraient au rendez-vous… (…)
Le RU 486 permettra d’éviter quelques troubles de conscience. Puisque cette pilule aiderait précisément, avant qu’elle ne se pose, à régler la question dans un flou artistique, entre contraception et avortement. » (…) Les choses, heureusement, ne sont pas si simples.
(P. Volle, Les Arbres… t.2 p.81-82)
Source Archives privées Pierre Gastal
Voir également la Rétrospective de 1984 à 2010 qui à travers une revue de presse très éclectique et très révélatrice, montre le chemin parcouru par cette pilule, les motivations de ses promoteurs et les conséquences sur la société, non seulement en France et dans le monde entier.
NDLR. Le panégyrique de France Info illustre bien non seulement la vie de l’homme loué par notre président qui lui remettra la Grand-Croix de la Légion d’Honneur en mars 2023, mais également l’impact et les conséquences à long terme qu’il a eu sur l’évolution de la société, non seulement en France mais aussi dans le monde entier.



